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Décarbonation industrielle : Comment le Maroc se prépare

En 2023, l’Union européenne projette de taxer les importations aux entreprises étrangères exportant sur son territoire et le Maroc est concerné par ces dispositions en perspective. Concrètement dans ce nouveau mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), l’Europe définirait un seuil d’émissions de gaz à effet de serre à partir duquel une activité économique est considérée comme polluante.

Au Maroc, plusieurs secteurs industriels sont concernés par cette nouvelle mesure. Il s’agit notamment de l’automobile, la parachimie, l’électricité et les fertilisants. Le textile et l’industrie agro-alimentaire pourraient être aussi touchés. Il est nécessaire aussi de prévenir dès à présent l’éventuel impact que pourrait avoir la taxe carbone sur la compétitivité de l’activité. Pour l’heure, si les opérateurs économiques marocains sont dans l’attente de plus de détails quant à ce mécanisme, du côté institutionnel on s’y prépare activement. Au-delà des contraintes que cela engendrerait pour l’industrie et pour l’export, cela pourrait être aussi une opportunité pour renforcer la compétitivité de l’origine Maroc et donner une image de destination de production industrielle carbone neutre. Et ce, grâce notamment aux projets de zone industrielle au carbone neutre qui sont au programme, est-il avancé du côté de l’AMEE.

Rappelons que l’Agence opère désormais dans le développement de la production propre dans l’industrie et la mobilité durable. Dans ce contexte, elle joue un rôle important dans l’accompagnement du secteur industriel marocain à sa décarbonation. Le récent programme «Tatwir Vert» qui s’inscrit dans le cadre du Plan de relance industrielle, lancé avec Maroc PME sous l’égide du département ministériel de l’industrie, met en place à cet effet des subventions pour accompagner les investissements des PME et TPME. A noter que, outre la réduction de la pollution industrielle, «Tatwir croissance verte» vise le soutien de l’émergence de nouvelles filières industrielles vertes.

C’est aussi un outil d’accompagnement des TPME industrielles dans leurs opérations de développement de process et produits décarbonés. Financièrement, ce programme apporte un soutien de l’ordre d’un milliard DH à l’investissement des TPME industrielles dans le domaine de l’économie verte. Dans l’accompagnement à la décarbonation, d’autres lignes de financement comme la Green Value Chain (GVC) et la Green Economy Financial Facility, sont mises en place par les partenaires européens avec des institutions financières partenaires. Elles sont établies pour permettre aux PME de financer des technologies vertes qui visent la gestion des ressources, les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique, Il est à rappeler que le programme Green Economy Financial Facility compte plus de 150 institutions financières partenaires dans 27 pays et plus de 20.000 clients bénéficiaires.

Sur le plan financier, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et ses partenaires ont signé plus de 5 milliards d’euros. Il est estimé que l’opération dans sa globalité a permis d’éviter des émissions équivalentes à 9 millions de tonnes de CO2 par an avec une réduction de la consommation électrique de 30 millions de MWh par an. Dans le Royaume, à travers les différents programmes mis en oeuvre (Morseff 2015-2019, Green Value Chain lancé en 2019 et GEFFII lancé en 2020), la BERD aura financé 360 millions d’euros de lignes de financement vert, d’ici fin 2025. Pour pousser les industries à miser sur de nouveaux modèles de production durable, l’accompagnement de l’Etat aux entreprises pour la compensation des surcoûts engendrés par l’adoption des nouvelles technologies vertes est assurément aussi incitatif.

Pour rester compétitif, le Maroc forme aussi le projet de mettre en place une norme marocaine reconnue au niveau européen pour évaluer le bilan carbone des entreprises nationales. Il est dit que ce projet avance bien et attend que l’Europe fixe les points à calculer. Parallèlement, le Royaume discute avec l’UE un pacte vert qui liera les deux parties. Outre accompagner le processus de décarbonation, il est question dans ce cadre d’accompagner la transition vers l’économie verte car le développement durable n’est plus un luxe mais bien une nécessité.