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Financement de la transition énergétique : Une offre au diapason

Les offres de financement dédiées à soutenir les investissements verts des entreprises se sont considérablement étoffées ces dernières années et deviennent de plus en plus faciles d’accès. Tour d’horizon.

78 milliards de dollars. C’est le montant total des investissements nécessaires pour ancrer solidement le Maroc sur une trajectoire de résilience et bas carbone à l’horizon 2050, selon un récent rapport de la Banque mondiale. La réalisation de ces investissements sera certes progressive, mais il existe déjà une panoplie d’offres et de produits de financement, émanant d’institutions publiques ou d’initiatives privées, visant à encourager les investissements verts, notamment ceux des PME. Ces solutions prennent le plus souvent la forme de subventions ou de produits de dettes (notamment via le leasing).
Parmi celles proposées par l’État figure le programme «Tatwir croissance verte», lancé en 2021. Déployé à travers l’Agence nationale pour la promotion de la PME (Maroc PME) et l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE), ce programme accompagne les TPME industrielles dans leurs démarches de développement de process et produits décarbonés. Ce produit s’adresse à la PME, en amorçage ou en croissance, dont le chiffre d’affaires annuel HT est compris entre 10 et 200 MDH.

Parmi les incitations qu’il propose figurent un financement allant jusqu’à 90% de l’étude technique des projets de décarbonation et une prime d’investissement de 30% pour le financement de ces projets (moyennant un apport en fonds propres de 10% de la part des PME). Toujours au volet des offres de financement émanant du secteur public, on retrouve le produit Green Invest, développé par Tamwilcom (ex-Caisse centrale de garantie), lancé dès 2019.

Ce produit propose des financements conjoints avec les banques pour l’acquisition des biens matériels (ou immatériels) ainsi que des installations techniques et des constructions. Le montage financier est relativement simple : 40% provenant de Tamwilcom avec un plafond de 10 millions de dirhams à un taux de 2,5% et une maturité pouvant aller jusqu’à 12 ans, jumelé à un financement de 40% provenant de la banque (au taux négocié avec cette dernière et avec la même maturité) et 20% en fonds propres.
À noter que tous les secteurs productifs sont éligibles, à l’exclusion de la promotion immobilière et de la pêche hauturière. Les projets concernés portent sur la production d’énergies renouvelables, l’amélioration de l’efficacité énergétique, la valorisation des déchets, ainsi que la conception d’équipements qui permettent la production d’articles et de services verts.
Le secteur privé s’est lui aussi mis au diapason. Certaines banques ont même placé le financement de la transition énergétique au cœur de leur stratégie, et proposent des produits qui encouragent les investissements dans le green, comme par exemple la Green Economy Financial Facility (GEFF) lancée en 2020.

Ce programme initié par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), dédié à l’efficacité énergétique, aux énergies renouvelables et à la gestion des ressources (eau, déchets, etc.), est doté d’une enveloppe de 163 millions d’euros. Il facilite l’accès au financement des projets verts par un package complet : un financement allant jusqu’à 5 millions d’euros par projet d’investissement, une subvention de 10% du financement éligible et une assistance technique gratuite.

À noter que le programme GEFF succède à la mise en œuvre réussie du programme MorSEFF au cours de la période 2015-2021, qui a mobilisé une enveloppe de 110 millions d’euros via huit banques partenaires.
La Green Value Chain (GVC) est une autre ligne de financement lancée par la BERD en 2019. Doté de 90 millions d’euros, ce programme s’adresse aux PME opérant dans des chaînes de valeur, leur permettant de financer des technologies vertes, qui intègrent l’efficacité énergétique et la gestion des ressources. La GVC permet de bénéficier d’un soutien technique pour développer un projet d’investissement à la fois vert et rentable, d’un prêt bancaire ou leasing par l’intermédiaire d’une des banques partenaires, ainsi que d’une subvention de 10% du montant du financement. À travers les différents programmes initiés (MorSEFF 2015-2019, Green Value Chain lancée en 2019 et GEFFII lancé en 2020), la BERD devrait débloquer au Maroc, d’ici fin 2025, plus de 3,6 milliards de dirhams de lignes de financement vert.
Du côté des banques commerciales, on assure même que les financements pour les projets dédiés à la décarbonation sont plus faciles à obtenir par rapport aux autres projets. Surtout, ils se rentabilisent assez vite, notamment grâce aux économies d’énergie ou d’eau qu’ils permettent : avec les économies réalisées durant le cycle de production, l’entreprise peut dégager de la trésorerie pour continuer à financer ses investissements. À bon entendeur…


Le Sustainability Linked Loan, un financement innovant
La panoplie des financements verts s’est enrichie cette année d’un nouveau produit, lancé pour la première fois au Maroc par la BMCI : le Sustainability Linked Loan (SLL). Il s’agit d’un crédit dont le coût évolue en fonction de l’atteinte d’indicateurs clés de performance environnementale, sociétale et de gouvernance (les fameux critères ESG). Concrètement, la banque et son client s’accordent sur des indicateurs extrafinanciers matériels et des objectifs d’évolution suffisamment ambitieux. Ces indicateurs (consommation d’eau, émissions de CO2, taux de femmes dans l’effectif de la société, etc.) sont mesurés annuellement par un auditeur externe indépendant pendant toute la durée du prêt. Si les objectifs sont atteints, le taux du financement sera revu à la baisse. Une version simplifiée du SLL, surtout pour le tissu de PME-PMI, est en train d’être lancée.